Dans trois arrêts, la Cour de cassation a précisé les circonstances dans lesquelles la rupture conventionnelle est permise (Cass. soc. 23 mai 2013, 12-13865 ; Cass. soc. 26 juin 2013, 12-15208 ; Cass. soc., 3 juillet 2013, 12-19.268).
La position de certains juges du fond
Certains juges considéraient en effet que la rupture conventionnelle était nécessairement illicite lorsqu’elle intervenait dans un contexte conflictuel. Autrement dit, il suffisait au salarié de démontrer que la rupture conventionnelle avait été conclue à une période de tension ou de conflit avec l’employeur pour obtenir la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La réponse de la chambre sociale
La Chambre sociale de la Cour de cassation à mis fin au débat et rendu trois arrêts très clairs, dont voici un extrait du premier :
« Mais attendu que, si l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l’article L. 1237-11 du code du travail, la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties ;
Et attendu qu’après avoir relevé que l’employeur avait menacé la salariée de voir ternir la poursuite de son parcours professionnel en raison des erreurs et manquements de sa part justifiant un licenciement et l’avait incitée, par une pression, à choisir la voie de la rupture conventionnelle, la cour d’appel qui, exerçant son pouvoir souverain d’appréciation, a fait ressortir que le consentement de la salariée avait été vicié, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision » (Cass. soc. 23 mai 2013, 12-13865).
Une sécurisation de la rupture conventionnelle limitée
Pour les employeurs, ces décisions sécurisent davantage les ruptures conventionnelles. En théorie, il est désormais envisageable pour l’employeur de recourir à la rupture conventionnelle pour rompre le contrat de travail d’un salarié avec lequel il existe un conflit ouvert, voire qu’il envisage de licencier.
Attention toutefois…
Le salarié conserve la possibilité de contester la validité de la rupture conventionnelle. Il obtiendra gain de cause s’il démontre qu’il ne souhaitait pas quitter l’entreprise mais qu’il y a été contraint, en raison de pressions subies en ce sens.
Par conséquent, il convient d’inviter les employeurs à la plus grande prudence lors de la signature des ruptures conventionnelles, notamment en s’assurant du libre consentement du salarié. Le cas échéant, cette liberté du salarié sera appréciée par le Conseil de prud’hommes.
Solution pratique
Afin de réduire le risque de contestations et d’emporter la conviction des juges en cas de contestation, il est recommandé de formaliser clairement la volonté du salarié de rompre son contrat de travail par le biais d’une rupture conventionnelle. A défaut, la rupture conventionnelle est proscrite.
L’employeur ne doit pas négliger le formalisme puisque la Cour de Cassation a considéré récemment que :
- La remise au salarié d’un exemplaire non-signé par l’employeur emporte nullité de la convention de rupture (Cass. Soc., 3 juillet 2019, n°17-14.232) ;
- La mention « remis en deux exemplaires » inscrite dans la convention de rupture ne permet pas à elle seule de présumer que l’acte a effectivement été remis au salarié (Cass. Soc., 3 juillet 2019, n°18-14.414).
Ce travail en amont est d’autant plus important que la Cour de cassation avait également précisé qu’elle considère comme non écrite la clause de renonciation à tout recours qui aurait été insérée dans la convention de rupture conventionnelle… (Cass. soc. 26 juin 2013, 12-15208).
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