Avec cet article, je poursuis la série concernant les impacts de la loi 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale sur les relations collectives de travail. Après le comité d’entreprise, la négociation collective.
4 points doivent être relevés à ce sujet :
- la création de règles d’opposition à l’extension des conventions de branches et accords professionnels ou interprofessionnels (1) ;
- la possibilité d’élargir une convention de branche à une branche ayant une activité conventionnelle faible (2) ;
- la possibilité de refuser l’extension des conventions signées par les branches dont l’activité conventionnelle n’est pas régulière et durable (3) ;
- la possibilité d’intégrer les thèmes de la négociation obligatoire dans un accord unique (4).
1/ La création de règles d’opposition à l’extension des conventions de branches et accords professionnels ou interprofessionnels
1. L’extension d’une convention de branche ou d’un accord est décidée par le ministre du travail et a pour objet de le rendre obligatoire pour toutes les entreprises entrant dans son champ d’application.
En effet, au moment de sa signature, une convention ou un accord ne s’applique qu’aux entreprises adhérentes des syndicats signataires.
Une fois étendu, il s’applique également aux entreprises qui ne sont pas adhérentes des syndicats signataires mais qui sont visées dans son champ d’application, c’est-à-dire qui ont la même activité.
La possibilité pour un syndicat de s’opposer à cette extension revêt donc un enjeu fondamental. Elle lui permet de refuser de se voir appliquer une convention qu’il n’a pas signée.
2. Or, avant la loi, l’article L. 2261-19 du Code du travail prévoyait seulement que pour pouvoir être étendus, la convention de branche ou l’accord professionnel ou interprofessionnel, leurs avenants ou annexes, devaient avoir été négociés et conclus en commission paritaire.
La loi du 5 mars 2014 a ajouté la possibilité pour un ou plusieurs syndicats d’employeurs de s’opposer à l’extension de la convention ou de l’accord.
Pour ce faire, ces syndicats doivent remplir deux conditions :
- Être reconnus représentatifs au niveau considéré ;
- Avoir des entreprises adhérentes employant plus de 50 % de l’ensemble des salariés des entreprises adhérant aux syndicats reconnus représentatifs à ce niveau. Le nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes est attesté par un commissaire aux comptes, dans des conditions qui seront déterminées par décret en Conseil d’État.
2/ La possibilité d’élargir une convention de branche à une branche ayant une activité conventionnelle faible
La loi a cherché à encourager les organisations syndicales des branches professionnelles a conclure des accords en ajoutant un article L. 2261-32 au code du travail.
Désormais, le ministre pourra élargir aux branches professionnelles ayant une activité conventionnelle faible les stipulations d’une autre convention collective.
Autrement dit, les règles conventionnelles applicables aux entreprises exerçant une activité seront rendues applicables aux entreprises en exerçant une autre si leur branche est considérée comme n’ayant pas suffisamment signé d’accords.
Les conditions prévues par l’article sont les suivantes :
- Seules les branches dans lesquelles au moins 5% des entreprises adhèrent à une organisation professionnelle d’employeurs représentative.
- Au cours des 5 années précédentes, la branche a négocié peu d’accord ou abordé trop peu de thèmes différents.
- L’appréciation de la faiblesse de l’activité conventionnelle est effectuée au regard des obligations et de la faculté de négocier dans la branche concernée.
- Le ministre doit préalablement recueillir l’avis de la commission nationale de la négociation et informer les syndicats de la branche concernée. Ces dernier bénéficieront alors d’un délai d’au moins un an pour réagir pour pallier l’insuffisance.
3/ La possibilité de refuser l’extension des conventions signées par les branches dont l’activité conventionnelle n’est pas régulière et durable
La loi dispose que le ministre peut sanctionner certaines branche en refusant de procéder à l’extension des conventions qui y sont signées.
Les branches concernées sont celles dans lesquelles « au moins 5% des entreprises adhèrent à une organisation professionnelle représentative des employeurs et dont les caractéristiques, eu égard notamment à sa taille limitée et à la faiblesse du nombre des entreprises, des effectifs salariés et des ressources disponibles pour la conduite de la négociation, ne permettent pas le développement d’une activité conventionnelle régulière et durable en rapport avec la vocation des branches professionnelles et respectant les obligations de négocier qui lui sont assignées ».
En clair, le petites branches qui ne parviennent pas à signer régulièrement des conventions se verront refuser la possibilité d’étendre ces conventions.
Ces conventions ne demeureront donc applicables qu’aux seuls adhérents des syndicats signataires sans pouvoir être appliquées à l’ensemble des entreprises exerçant la même activité.
4/ La possibilité d’intégrer les thèmes de la négociation obligatoire dans un accord unique
A titre expérimental, un accord conclu entre l’employeur et les organisations syndicales de salariés peut regrouper dans une négociation unique dite de « qualité de vie au travail » tout ou partie des négociations obligatoires (art. 33, loi 2014-288 du 5 mars 2014).
Cet accord pourra porter sur les matières suivantes :
- Égalité professionnelle ;
- Durée et organisation du temps de travail ;
- Prévoyance maladie ;
- Conditions d’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles ;
- Conditions de travail et d’emploi et actions de sensibilisation au handicap ;
- Mobilité professionnelle ou géographique ;
- Prévention de la pénibilité.
En revanche, la négociation annuelle sur les salaires est exclue du champ de cet accord.
Enfin, la loi précise que si aucun accord unique n’a été conclu, la négociation sur la qualité de vie au travail sera intégrée à celle portant sur les modalités d’exercice du droit d’expression prévue à l’article L. 2281-5 du code du travail.
La conclusion de l’accord sur une négociation unique présente un réel intérêt : pendant sa durée d’application, c’est-à-dire 3 ans, l’obligation annuelle de négocier est suspendue pour les thèmes compris dans l’accord.
Rétroliens/Pings