Le sujet est à la une de tous les médias après les nombreuses révélations de femmes victimes de harcèlement sexuel dans la vie quotidienne ou dans le cadre du travail.
Certains employeurs et DRH s’interrogent alors sur la définition du harcèlement sexuel en droit du travail ?
A partir de quand le harcèlement sexuel est-il caractérisé ?
Dans le Code du travail, la définition du harcèlement sexuel est composée de deux parties distinctes. Le harcèlement sexuel peut être constitué :
- par des « propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. » La première partie de la définition vise l’hypothèse des faits répétés du type blagues à caractère sexuel, remarques déplacées, etc. Je vous renvoie pour exemple à mon article précédent. Dans la première partie de la définition, une répétition de faits est nécessaire.
- par « toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. » Cette seconde partie de la définition vise l’acte unique, la pression exercée sur une personne. Dans un soucis de meilleure protection des victime, la définition précise bien que la pression qui donne l’apparence que son auteur cherche à obtenir un acte de nature sexuelle caractérise un harcèlement moral. L’auteur ne peut donc pas se prévaloir de l’ambiguïté de la situation comme certains le prétendent. De la même manière, un « acte de nature sexuelle » n’est pas une relation sexuelle. La notion est beaucoup plus large et peut donc correspondre à de simples contacts physiques ayant une connotation sexuelle. Enfin, l’acte recherché n’a pas nécessairement à l’être au profit de l’auteur du harcèlement.
On constate donc que la définition de harcèlement sexuel est suffisamment large pour que de nombreux faits puissent être considérés comme tel, qu’ils soient répétés ou isolés.
Notons également que la harcèlement sexuel au travail peut également être reconnu pour des faits commis en dehors de l’entreprise et des horaires de travail. Il s’agira alors de l’hypothèse dans laquelle les faits qui, bien que commis en dehors de cadre professionnel au sens strict, relèvent en réalité quand même de la sphère professionnelle.
La Cour de cassation a par exemple considéré qu’un salarié s’était rendu coupable de harcèlement sexuel pour avoir organisé un rendez-vous avec une collaboratrice placée sous ses ordres pour un motif professionnel en dehors des heures de travail et l’avait entraînée dans une chambre d’hôtel. Selon la Cour de cassation, le fait d’abuser de son pouvoir hiérarchique dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles constitue bien un harcèlement sexuel même si les agissements ont eu lieu en dehors du temps et du lieu de travail.
Face à une augmentation des dénonciations de faits de harcèlement sexuel, la cour de cassation encadre ces demandes en considérant par exemple que « l’attitude ambiguë de cette dernière qui avait ainsi volontairement participé à un jeu de séduction réciproque excluait que les faits reprochés au salarié puissent être qualifiés de harcèlement sexuel » (Cass. Soc. 25 sept 2019, n° 17-31.171)
Enfin, au-delà du droit du travail, je rappelle également que le harcèlement sexuel est aussi une infraction pénale figurant définie et sanctionnée à l’article 222-33 du code pénal :
« I. – Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
II. – Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
III. – Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.
Ces peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende lorsque les faits sont commis :
1° Par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;
2° Sur un mineur de quinze ans ;
3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;
4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ;
5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice. »
Le salarié auteur de harcèlement sexuel risque donc évidemment une sanction en droit du travail, telle qu’un licenciement pour faute grave, mais aussi une peine d’emprisonnement ou d’amende. Les deux peines peuvent en effet se cumuler.