La Cour de cassation a récemment rendu un arrêt intéressant, rappelant le cadre dans lequel le contrôle de l’alcoolémie des salariés est possible.
Cette décision fournit l’occasion de rappeler que la recherche de l’équilibre entre les droits des salariés et de l’employeur conduit à accorder une importance considérable au formalisme du règlement intérieur.
« Ne constitue pas une atteinte à une liberté fondamentale, le recours à un contrôle d’alcoolémie permettant de constater l’état d’ébriété d’un salarié au travail, dès lors qu’eu égard à la nature du travail confié à ce salarié, un tel état d’ébriété est de nature à exposer les personnes ou les biens à un danger, et que les modalités de ce contrôle, prévues au règlement intérieur, en permettent la contestation, peu important qu’il s’effectue, pour des raisons techniques, hors de l’entreprise » (Cass. soc. 31 mars 2015, n° 13-25436).
A la recherche de l’équilibre entre les droits des salariés et ceux de l’employeur
Le principe général qui prévaut concernant l’alcool en entreprise semble incroyable à notre époque, mais rappelons le : la consommation d’alcool est permise (y compris à l’intérieur de l’entreprise !).
Il s’agit même, … accrochez-vous… d’une liberté fondamentale !
Ce principe est mis en balance avec les contraintes de fonctionnement de l’entreprise et l’obligation de sécurité de résultat à laquelle est tenu l’employeur, qui lui permet d’apporter quelques restrictions à la liberté des salariés.
Parmi ces restrictions figure le contrôle de leur alcoolémie.
C’est bien dans cette logique d’équilibre entre les droits des salariés et ceux de l’employeur que la Cour a fondé son raisonnement dans cet arrêt du 31 mars 2015, et conformément à sa position habituelle.
Alors comment réussir le contrôle de l’alcoolémie de vos salariés sans porter atteinte à leurs droits fondamentaux ?
1. Tout d’abord, le contrôle d’alcoolémie n’est possible que s’il est prévu par le règlement intérieur.
Il est en règle générale réalisé par éthylotest, par un supérieur hiérarchique et en présence de témoins pour garantir un déroulement contradictoire du contrôle.
2. De plus, le règlement intérieur doit limiter le contrôle aux salariés occupant des tâches particulières.
L’employeur doit être en mesure de démontrer que l’état d’ébriété des salariés visés « est de nature à exposer les personnes ou les biens à un danger ».
Concrètement le règlement intérieur doit lister les types de postes concernés (cariste, chauffeurs, travailleurs en hauteur, …). Une clause générale et non motivée visant tous les salariés de l’entreprise est inapplicable.
3. Le règlement intérieur doit en outre prévoir des modalités de contestation des résultats du contrôle.
Concrètement, il convient de prévoir la faculté pour le salarié d’effectuer un test contradictoire et les règles de déroulement de ce nouveau test pour valider ou infirmer les résultats du premier test.
4. Enfin, attention à ne pas tomber dans un excès d’encadrement par le règlement intérieur.
Vous êtes en effet tenus par le cadre que vous décidez de fixer dans le règlement.
Si vous prévoyez des garanties supplémentaires et ne les respectez pas au moment du contrôle ou de la sanction, le licenciement sera nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, voire nul.
A titre d’exemple, la Cour de cassation a sanctionné un employeur qui avait licencié un salarié pour ébriété après avoir effectué un contrôle inopiné de l’alcoolémie d’un groupe de salarié (Cass. soc. 2 juil. 2014, n° 13-13.757). Dans cette affaire, l’employeur a contrôlé un groupe complet de travailleurs. L’un d’entre eux s’est révélé être en état d’ébriété, l’employeur l’a alors licencié pour faute grave. Or, son propre règlement intérieur prévoyait que le contrôle d’alcoolémie pouvait être imposé aux salariés présentant un état d’ébriété apparent, dans le but de faire cesser immédiatement la situation.
Le salarié, qui ne présentait pas un état d’ébriété apparent a logiquement obtenu gain de cause devant la Cour de cassation qui a considéré le licenciement comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse !
L’employeur a donc été piégé par les dispositions de son propre règlement intérieur qui restreignaient sa faculté de contrôle et qu’il n’a pas respectées.
Toutefois, l’employeur peut prévoir grâce au règlement intérieur que la consommation d’alcool est interdite sur le lieu de travail.
Pour conclure
Pensez à consulter votre règlement intérieur avant de procéder à un contrôle de l’alcoolémie de vos salariés.
Si envisagez de mettre en place ou de modifier le règlement intérieur, prenez soin de le faire « sur mesure » en fonction du mode de fonctionnement et de l’activité propres à votre entreprise et prêtez la pus grande attention à la précision et à l’équilibre de sa rédaction. Il est donc conseillé d’éviter, ou a minima de relire avec un regard critique, les « modèles » fournis par certains sites internet ou experts comptables.
Pour aller plus loin :
Rappelons que l’équilibre entre les libertés des salariés et les droits de l’entreprise constitue une problématique omniprésente en droit du travail. Citons quelques domaines classiques dans lesquels cette recherche de l’équilibre est impérative et non moins délicate :
- Le contrôle des correspondances ;
- La liberté d’expression (vous pouvez d’ailleurs relire mon article sur le sujet « Pétition et liberté d’expression ») ;
- La géolocalisation et d’une manière générale le contrôle de l’activité des salariés ;
- La liberté d’opinion ou la liberté syndicale ;
- La tenue vestimentaire ;
- Le contrôle de l’usage de drogues.
Terminons sur cette note optimiste (ou pas !) : tout licenciement notifié en violation d’une liberté fondamentale est un licenciement nul…
c’est le cas aussi pour les produits stupéfiants
Le règlement intérieur peut fixer à la fois les règles, procédures et démarches à suivre en cas d’incapacité de travail dues aux comportements addictifs ainsi que les règles des tests préventifs.
» Les dispositions concernant les contrôles d’alcoolémie et d’usage de stupéfiants doivent figurer dans le réglement intéreur de manière à ce que l’information des salariés soit clairement précisée sur le rôle de la hiérarchie, ainsi que la liste des travaux de sécurité ou de sûreté concernés, lors d’un comportement anormal pour faire cesser une situation potentiellement dangereuse. »
source : Règlement intérieur et santé et sécurité au travail : http://www.officiel-prevention.com/protections-collectives-organisation-ergonomie/document-unique/detail_dossier_CHSCT.php?rub=38&ssrub=199&dossid=478
Le code du travail conseille également à l’employeur, d’afficher dans les locaux, les textes de loi relatifs à la consommation d’alcool et de drogues en entreprise.
Bonjour, je m’appelle frédéric BEERNAERT et je suis attaché d’exploitatation chez SUEZ.
hier j’ai eu un contrôle inopiné de la part de mon supérieur hiérachique aux alentours de 13h15 alors que j’étais en pause déjeuné.
elle m’a demander de faire demi tour et à sur sa demande controlé mon vl de service qui est mis à ma disposition.
Effectivement dans ma boite à gant il y avait une bouteille de RICARD quasiment vide,je lui est expliqué que quand je rentrais le soir après une journée de 11h,j’avais besoin de me détendre et que je pouvais consommer 2 ou 3 gorgé pour me détendre.
donc j’ai eu le droit à un contrôle par ballon vers 13h30 x2 avec une tiers personne. sur le moment les tests se sont révélés négatifs pour les trois personnes,nous avont donc tout jeté à la poubelle sans onotation sur les tests pour savoir à qui ils appartenaient. 30 minutes plus tard elle revient dans mon bureau et me rapelle pour me montrer deux tests passés en rouge.
elle ne peut à mon avis pas prouver que ce sont les miens?
d’autre par j’ai demander à refaire un troisième test,et cette fois avec un appareil type gendarmerie et j’étais bien 0,00.
ils m’ont mis une mise à pied conservatoire de 5 jours en vue d’un entretien qui peut amener à un licenciement.
Sont-t-ils dans leurs bons droits? sachant que j’ai effectivement déjà été controlé positif en décembre 2019.
Mais cette fois ci je conteste les tests type « ballon’
dépistage inopiné pendant un temps de pause de 12h30 à 14h environ.