Actualité du mois d’avril – Ce qu’il ne fallait pas manquer en Droit social
Etablissements distincts : la négociation est un préalable obligatoire
L’article L. 2313-4 du code du travail dispose qu’en l’absence d’accord, l’employeur fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts.
La question posée à la Cour de cassation était la suivante : est-il obligatoire d’engager une négociation concernant les établissements distincts avant de pouvoir recourir à une décision unilatérale ?
La Cour de cassation a considéré que : « ce n’est que lorsque, à l’issue d’une tentative loyale de négociation, un accord collectif n’a pu être conclu que l’employeur peut fixer par décision unilatérale le nombre et le périmètre des établissements distincts » (Cass. soc., 17 avril 2019, n° 18-22.948).
La décision unilatérale de l’employeur est donc subsidiaire, et l’employeur ne devra y recourir qu’après avoir tenté de négocier avec les organisations syndicales. Ce faisant, la Cour de cassation impose à notre avis aux employeurs une obligation qui ne se retrouve pas dans la lettre du code du travail.
Concrètement, vous devrez être en mesure de prouver que vous avez vainement tenté de négocier sur le nombre et le périmètre des établissements distincts pour justifier d’une décision unilatérale.
Différence de traitement instaurée par accord : attention à sa justification
Jusqu’à présent, la Cour de cassation considérait que les différences de traitement, prévues par conventions et accords collectifs signés par les organisations syndicales représentatives, étaient présumées justifiées (Cass. soc., 27 janvier 2015, 13-14.773).
Dans un arrêt du 3 avril 2019 (n° 17-11.970), la Cour apporte un tempérament à ce principe. Elle affirme en effet que cette présomption de justification ne s’applique pas aux « domaines où est mis en œuvre le droit de l’Union européenne ».
Par conséquent, lorsque la différence de traitement négociée avec les organisations syndicales porte sur un domaine du droit de l’Union européenne, la preuve de la légitimité de la différence de traitement incombe à l’employeur, qui ne peut se prévaloir d’une quelconque présomption de légitimité.
En pratique, lorsque vous négociez un accord prévoyant une différence de traitement entre vos salariés, vous aurez intérêt, avant même la signature, à anticiper toute demande de justification en identifiant les critères objectifs et pertinents légitimant la différence de traitement négociée.
Victimes de l’amiante : un élargissement des bénéficiaires du préjudice d’anxiété
Jusqu’à présent, seuls les salariés ayant travaillé dans un établissement de fabrication de matériaux contenant de l’amiante, de flocage et de calorifugeage à l’amiante ou de construction et de réparation navale pendant une période où étaient fabriqués ou traités l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante pouvaient demander réparation de leur préjudice d’anxiété (Cass. Soc., 11 mai 2010, n° 09-42.242).
Dans un arrêt rendu le 5 avril 2019 (n° 18-17.442) la Cour de cassation élargit la liste des salariés pouvant bénéficier d’une réparation du préjudice d’anxiété : tout « salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 modifiée ».
Pour bénéficier d’une indemnisation au titre du préjudice d’anxiété, le salarié devra donc tout de même prouver une exposition effective à l’amiante.