Actualité du mois d’avril – Ce qu’il ne fallait pas manquer en Droit social
Le recours par l’employeur à l’intelligence artificielle ne justifie pas automatiquement la désignation d’un expert par le CHSCT
Le contexte : Le CHSCT avait décidé de recourir à un expert avant de rendre son avis sur un projet de l’employeur visant à introduire une application spécifique du programme d’intelligence artificielle Watson. Le programme visait à « aider les chargés de clientèle à traiter les abondants courriels qu’ils reçoivent soit en les réorientant à partir des mots clés qu’ils contiennent vers le guichet où ils pourront être directement traités en raison des compétences préalablement définies par le chef d’agence au vu de la demande, soit en les traitant par ordre de priorité en raison de l’urgence qu’ils présentent et qui leur sera signalée, soit encore à y répondre d’une manière appropriée en proposant une déclinaison de situations permettant d’adapter sans oublis la réponse à la question posée ».
Le rôle de l’expert consistait alors à permettre au CHSCT de mieux analyser les conséquences du projet sur la santé, la sécurité et les conditions de travail des salariés.
L’employeur a contesté la nécessité de l’expertise.
Solution de la Cour de cassation : Elle a annulé la délibération du CHSCT désignant l’expert au motif que l’existence d’un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés, qui par principe justifie le recours à un expert par le CHSCT, n’était pas démontrée. Au contraire, elle a établi que le projet mis en œuvre par l’employeur allait avoir des conséquences mineures dans les conditions de travail directes des salariés dont les tâches allaient se trouver facilitées (Cass. soc. 12 avril 2018 n°16-27866).
Cette solution conserve son intérêt avec l’entrée en vigueur du CSE qui dispose, comme le CHSCT, de la possibilité de recourir à un expert dans le cadre de sa consultation sur un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (art. L 2315-94 c. trav.).
Non respect du délai de dépôt des accords d’intéressement = redressement URSSAF !
Le contexte : Une société a fait l’objet d’un redressement par l’URSSAF au motif que les sommes allouées par la société aux salariés ne pouvaient bénéficier des exonérations légales au titre de l’intéressement eu égard au fait que la société ne justifiait pas avoir adressé l’accord d’intéressement à la DIRECCTE dans le délai de 15 jours suivant sa signature.
La solution de la Cour de Cassation : Elle confirme la position des juges du fond ayant considéré le redressement justifié :
«Pour ouvrir droit aux exonérations de cotisations sur les sommes versées aux salariés à titre d’intéressement, les accords d’intéressement doivent aux termes de l’article D. 3313-1 du code du travail avoir été déposés par la partie la plus diligente au plus tard dans les quinze jours suivant leur conclusion, à la direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle du lieu où ils ont été conclus ;
(…) La Cour d’appel, qui a constaté, par motifs propres, que la société ne rapportait pas la preuve d’avoir déposé les accords dans le délai réglementaire, en a exactement déduit que le redressement était justifié » (Cass. 2e civ. 4 avril 2018 n°17-10574).
La retenue sur salaire peut être justifiée
Le contexte : Un salarié avait bénéficié du maintien de son salaire à l’occasion de la prise de repos compensateurs de remplacement. Or l’employeur avait constaté par après que ces repos compensateurs lui avaient été accordés par erreur et n’étaient en réalité par ouverts. Il avait donc procédé à des retenues sur son salaire afin d’obtenir restitution des sommes indûment payées.
La Cour de cassation valide cette position (Cass. soc. 5 avril 2018 n°16-26712).
Elle rappelle en effet que dans la mesure où les sommes versées par erreur avaient la nature de salaire, l’employeur pouvait les recouvrer en procédant par compensation avec les salaires à devoir.