En 2021, plusieurs arrêts de la Cour de cassation concernent la visite de reprise au retour d’un salarié arrêté au moins 30 jours et pour lequel aucun avis d’inaptitude n’a été rendu.
1/Organiser la visite de reprise
a) Obligation pour l’employeur…
A l’issue d’un arrêt de travail, un salarié doit reprendre son travail, ou avertir son employeur et lui transmettre un nouveau certificat médical justifiant la prolongation de son arrêt.
Le travailleur bénéficie d’un examen de reprise du travail par le médecin du travail (R.4624-31 c.trav.):
- Après un congé de maternité ;
- Après une absence pour cause de maladie professionnelle ;
- Après une absence d’au moins trente jours pour cause d’accident du travail ;
- Après une absence d’au moins soixante jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnel.
Dès que l’employeur a connaissance de la date de la fin de l’arrêt de travail, il saisit le service de prévention et de santé au travail qui organise l’examen de reprise le jour de la reprise effective du travail par le travailleur, et au plus tard dans un délai de huit jours qui suivent cette reprise.
La visite de reprise permettra de s’assurer que le salarié est apte à reprendre à son poste.
b) …si le salarié se manifeste
Le 13 janvier 2021, la Cour de cassation a rendu un arrêt dans une affaire où le salarié avait été en arrêt de travail pour maladie et n’avait pas manifesté son intention de reprendre le travail après son arrêt de travail. Il n’avait pas non plus donné de nouvelles à l’employeur. Il n’avait pas plus justifié de la poursuite de son absence. Son employeur l’avait mis en demeure de justifier de son absence. Cette mise en demeure était restée lettre morte. Le salarié avait ensuite été licencié pour faute grave au motif d’un abandon de poste. Le salarié contestait son licenciement. Il soutenait qu’il est sans cause réelle et sérieuse dès lors que son employeur n’avait pas organisé de visite de reprise à l’issue de son arrêt de travail de sorte que celui-ci était toujours suspendu et qu’il ne pouvait pas le licencier (Cass. Soc., 13 janv. 2021, n°19-10.437).
La Cour de cassation énonce que si malgré une mise en demeure adressée au salarié en arrêt maladie, celui-ci n’a ni adressé les justificatifs de son absence, ni manifesté son intention de reprendre le travail, il ne peut pas être reproché à l’employeur, laissé sans nouvelles, de ne pas avoir organisé la visite de reprise. Le licenciement du salarié pour faute grave du fait de son absence injustifiée est validé.
Cet arrêt est cohérent avec la position habituelle de la Haute juridiction. Celle-ci considère que l’employeur n’est pas en mesure d’organiser la visite médicale de reprise s’il ignore la date d’expiration de l’arrêt de travail ou si le salarié ne manifeste pas sa volonté de reprendre son emploi (Cass. Soc. 13 mai 2015, n°13-23.606).
2/ Réagir à l’issue de la visite de reprise
a) Bien distinguer « l’avis d’inaptitude » de « l’avis d’aptitude avec réserve »
Le 24 mars 2021, la Cour de cassation s’est prononcée sur la situation d’une salariée qui avait été déclarée inapte par le médecin du travail. L’avis d’inaptitude avait été rédigé en ces termes : « conformément à l’article R. 4624-42 du code du travail, confirmation de l’aptitude au poste de travail de caissier. Contre-indication à tout travail de nuit après 22h ; possibilité de tout autre poste de travail respectant cette contre-indication ; capacité à bénéficier d’une formation » (Cass. Soc., 24 mars 2021, n° 19-16.558).
La Haute Juridiction fait application de l’article L. 4624-4 du Code du travail qui définit strictement la déclaration d’inaptitude.
En l’espèce, le médecin avait préconisé un changement de poste.
Logiquement, la Cour de cassation a jugé que l’avis du médecin du travail qui préconisait une modification du contrat de travail du salarié (passage de travail de nuit à travail de jour) et non pas un changement de poste (le poste de la salariée pouvant être travaillée de jour) devait s’analyser en un avis d’aptitude avec réserves.
b) Reprendre le versement du salaire
Le 3 février 2021, la Cour de cassation a statué sur une affaire dans laquelle une salariée avait été placée en arrêt de travail. Elle avait été déclarée « apte reprise au poste avec aménagement à temps partiel thérapeutique pour une durée prévisible de 3 mois ». L’inspecteur du travail, saisi par la société d’une contestation de cet avis, l’avait annulé et déclaré la salariée apte à reprendre son poste à temps complet. La salariée avait par la suite saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, puis, à la suite d’une déclaration d’inaptitude, avait été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement (Cass. Soc., 3 févr. 2021, n°19-24.102).
Dans cet arrêt, la Cour de Cassation rappelle que la visite de reprise à l’issue de laquelle le salarié a été déclaré apte à reprendre le travail avec aménagement à temps partiel thérapeutique met fin à la période de suspension du contrat de travail provoquée par la maladie. L’employeur était alors tenu de reprendre le paiement des rémunérations au salarié qui se tenait à sa disposition, peu important le recours exercé devant l’inspecteur du travail contre la décision du médecin du travail.
c) Contester l’avis d’inaptitude
L’employeur souhaitant contester les éléments de nature médicale justifiant l’avis d’inaptitude d’un salarié doit agir rapidement. Il ne dispose que de 15 jours pour saisir le Conseil de prud’hommes selon la procédure accélérée au fond (art. L.4624-7 et R.4624-45 c. trav.).
La Cour de Cassation considère que le point de départ de ce délai de 15 jours court à compter de la notification à l’employeur de l’avis d’inaptitude émis par le médecin du travail (Cass. soc., 2 juin 2021, 19-24.061).
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Vous pouvez retrouver plus de détails sur le suivi médical des salariés depuis le 31 mars 2022 dans notre article.
A lire également : notre article sur l’expérimentation de la visite médicale d’embauche des apprentis par le médecin de ville.