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Actualités sociales

Loi immigration

La loi dite immigration et intégration du 26 janvier 2024 impacte directement les entreprises. Voici les principales nouveautés à connaître.

 

1/ Dispositif temporaire (jusqu’au 31 décembre 2026) de régularisation dans les métiers en tension 

 

Un étranger en situation irrégulière pourra se voir délivrer, à titre exceptionnel, une carte de séjour temporaire « salarié » ou « travailleur temporaire » d’une durée d’1 an s’il remplit certaines conditions.

 

Une instruction du 5 février 2024 apporte des précisions sur les modalités de mise en œuvre de cette nouvelle disposition.

 

2/ Création d’une nouvelle amende administrative 

Une nouvelle amende administrative remplace la contribution spéciale et la contribution forfaitaire de l’OFII (Office français de l’immigration et de l’intégration) (art. L8253-1 et L8254-2 c.trav.).

Point important à relever : cette amende peut être infligée en cas d’emploi d’un étranger sans titre de travail, mais aussi en cas d’emploi d’un étranger ayant un titre de travail lorsque celui-ci est employé dans une catégorie professionnelle, une profession ou une zone géographique autres que celles mentionnées sur son titre.

Un décret doit préciser les conditions d’application de cette nouvelle amende.

3/ Création d’un « contrat d’engagement au respect des principes de la République »

Ce contrat devra être signé pour tous les étrangers sollicitant un titre de séjour (Article L412-7 CESEDA).

Point important à relever : le non respect du contrat est une cause de non renouvellement ou de retrait du document de séjour et donc de l’autorisation de travailqui y est attachée (L412-10 CESEDA).

4/ Encadrement des conditions de renouvellement des cartes de séjour

Les conditions de renouvellement  des cartes de séjour temporaire ou pluriannuelle sont révisées (art. L433-1 CESEDA nouveau).

5/ Simplification du dispositif « passeport talent »

Les nombreux « passeports talent » sont remplacés par trois cartes de séjours :

 

  • carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent – salarié qualifié » (art. L.421-9 CESEDA nouveau)
  • carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent – porteur de projet » (art. L.421-16 CESEDA nouveau)
  • carte de séjour « talent – profession médicale et de la pharmacie». (Art L421-13-1 CESEDA)

 

6/ La loi introduit plusieurs mesures afin d’organiser la contribution des entreprises à la formation en français des travailleurs étrangers allophones : 

L’étranger admis pour la première fois au séjour en France ou qui entre régulièrement en France entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans révolus, et qui souhaite s’y maintenir durablement, conclura avec l’Etat un « contrat d’intégration républicaine » par lequel il s’engage à suivre les formations et dispositifs d’accompagnement qui lui sont prescrits (L413-2 CESEDA).

Point important à relever : selon les cas soit la formation pourra être effectuée pendant le temps de travail et constituer un temps de travail effectif (art. L6323-3 c. trav.), soit elle donnera lieu à une autorisation d’absence du salarié (art. L6323-17 c. trav.). Ces mesures sont en attente de précisions réglementaires.

Nouveaux droits pour les travailleurs BOETH 

La loi pour le plein emploi permet notamment aux bénéficiaires de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (BOETH) d’accéder à certains droits nouveaux jusqu’alors réservés aux personnes RQTH :

  • Du dispositif d’emploi accompagné ;
  • De la possibilité d’être recrutés par une entreprise adaptée ;
  • Du déplafonnement de l’âge pour être engagés en qualité d’apprentis ;
  • De la majoration de la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle ;
  • De l’accès aux établissements et services de réadaptation professionnelle.

Elargissement du recours à la POEI 

La loi pour le plein emploi a élargi les cas de recours à la préparation opérationnelle à l’emploi individuelle (POEI) aux contrats d’une durée inférieure à 12 mois (art. L.6326-1 c.trav.).

Accès au passeport d’orientation, de formation et de compétences  

La loi pour le plein emploi permet désormais au salarié titulaire du CPF et disposant d’un passeport d’orientation, de formation et de compétences (qui recense les formations et les qualifications suivies dans le cadre de la formation initiale ou continue, ainsi que les acquis de l’expérience professionnelle) d’autoriser un tiers à le consulter.

Cet accès pourra faciliter l’accès à l’information pour les entreprises.

Exonération de charges sociales pour l’emploi d’un sapeur pompier volontaire 

L’employeur qui embauche un sapeur-pompier volontaire est éligible à la réduction temporaire des cotisations et contributions patronales si les trois conditions suivantes sont remplies :

  • Le sapeur-pompier volontaire est embauché entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026 en CDI ou CDD à temps plein ou partiel ou le salarié s’engage en tant que sapeur-pompier volontaire pour la première fois entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026 ;
  • Le salarié réalise, au cours de l’année civile et, en cas d’entrée en cours d’année dans l’établissement, à partir de cette date d’entrée, au moins une mission opérationnelle de secours d’urgence aux personnes victimes d’accidents, de sinistres ou de catastrophes et leur évacuation, ou une mission de protection des personnes, des biens et de l’environnement, en cas de péril ;
  • La rémunération du salarié est inférieure à 1,6 SMIC (soit 2 827,072 € au 1er janvier 2024).

 

Ces exonérations sont plafonnées à 2000 € par salarié et par an et à 10 000 € par entreprise et par an.

Reconversion des salariés exposés à des risques professionnels 

Un décret du 30 janvier 2024 apporte les précisions attendues sur :

  • les modalités de recours au C2P par les salariés exposés à des risques professionnels dans le cadre du dispositif de reconversion professionnelle.
  • le montant du co-financement obligatoire de l’employeur dans le cadre d’un projet de reconversion professionnelle sollicité par un salarié exposé aux risques ergonomiques et financé par le FIPU à au moins 5 % des coûts pédagogiques validés par la commission paritaire interprofessionnelle régionale

Contrats responsables et information des salariés 

Un décret du 16 février 2024 modifie les franchises médicales et participations forfaitaires du contrat responsable, à compter du 31 mars 2024 (D. 2024-114).

Conséquences pour les entreprises : pensez à informer vos salariés des modifications apportées au contrat frais de santé. 

Jurisprudence

Est ce qu’un enregistrement clandestin peut être recevable comme moyen de preuve devant un juge ? 

Oui mais sous conditions ! 

 

Dans cette affaire, la Cour de Cassation (14 février 2024, n° 22-23.073) rappelle que dans un procès civil, la preuve illicite n’est pas forcément irrecevable. En effet, quand une partie le lui demande, le juge doit « apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi ».

 

Dans cette affaire, la cour d’appel avait retenu que le visionnage des enregistrements avait été limité dans le temps, dans un contexte de disparition de stocks, après des premières recherches restées infructueuses et avait été réalisé par le seul dirigeant de l’entreprise.

 

La Cour de cassation a validé le raisonnement de la cour d’appel et a considéré que les images issues du dispositif de vidéosurveillance installé illicitement étaient bel et bien recevables et le licenciement fondé sur cette preuve était donc bien justifié.