Précisions sur la prime de partage de la valeur

La Direction de la sécurité sociale a publié le 10 octobre 2022 une instruction apportant des précisions concernant la prime de partage de la valeur (PPV). Nous vous présentons ci-dessous les principaux apports de l’Instruction, assortis pour certains de nos commentaires.

1/ Les bénéficiaires

  • L’employeur peut attribuer la prime à tous les salariés de l’entreprise ou seulement à ceux relevant d’un ou plusieurs établissements.
    • A noter : cette précision n’est pas prévue par la loi et semble contraire au principe d’égalité de traitement appliqué par la Cour de cassation. Nous sommes très réservés sur cette “précision” de l’Administration.
  • Les mandataires sociaux qui bénéficient d’un contrat de travail doivent bénéficier de la PPV.
  • La prime doit être versée aux apprentis dans les mêmes conditions que pour les autres salariés.
  • Les intérimaires en mission dans l’entreprise utilisatrice doivent bénéficier de la prime dans les mêmes conditions que les salariés de cette entreprise.

2/ La mise en place 

  • L’accord ou la DUE instituant la prime doit déterminer la date retenue pour apprécier la qualité de bénéficiaire :
    • Soit la date de versement de la prime (entendue comme la date de mise en paiement des salaires qui figure sur le bulletin de paie : date déclarée dans la rubrique S21 G00.50.001 de la DSN) ;
    • Soit la date de dépôt de l’accord auprès de la DDETS ;
    • Soit la date de signature de la DUE.
    • A noter : le choix doit se faire parmi ces seules options.
  • La prime peut être mise en place par DUE. L’employeur doit consulter le CSE avant le versement.
    • A noter : l’Instruction semble prévoir une consultation après signature de la DUE mais avant versement, ce qui nous semble là encore critiquable.

3/ La modulation et le versement 

  • Les critères de modulation (rémunération, niveau de classification, ancienneté, durée de présence effective et durée de travail) s’apprécient sur les 12 mois précédant le versement de la prime et sont cumulables.
    • A noter : La loi ne fait référence à “l’année écoulée” que pour l’appréciation du critère de la présence effective. Selon nous la prise en compte par l’Administration des 12 derniers mois pour l’ensemble des critères apporte d’avantage de confusion que de clarté alors même que la loi ne le prévoit pas. Par exemple, comment l’appliquer pour le critère de l’ancienneté ou de la classification ?
  • La prime peut être versée en plusieurs fois mais il s’agit d’une prime unique.
    • A noter : cela signifie qu’il ne sera pas possible de décider en cours d’année de verser une seconde prime, y compris en modifiant la DUE ou l’accord initial.
  • Dans les cas d’un versement en plusieurs fois :
    • La condition relative à la rémunération perçue par le salarié les 12 mois précédant le versement de la prime s’apprécie à la date du premier versement annuel de la prime.
    • Si un salarié est embauché postérieurement à la décision d’attribution, il n’est pas éligible aux versements effectués après son arrivée.
      • A noter : selon nous cette “précision” de l’Administration ne vaut que si le critère d’éligibilité n’est pas lié à la date de versement.
    • Inversement : si un salarié quitte l’entreprise avant le(s) dernier(s) versement(s) prévu(s) par l’accord, dans la mesure où au moment de la mise en place de la prime il y était éligible, il bénéficie de l’intégralité de la prime.
      • A noter : dans le cadre de cette “précision”, l’Administration sous-entend ainsi que le salarié a bénéficié du premier versement.
    • La limite des 3 SMIC s’apprécie à la date du premier versement.

4/ Conditions d’exonération 

  • Le SMIC retenu pour apprécier le plafond correspond au SMIC applicable durant les douze mois précédant le versement de la prime. Si celui-ci varie au cours des douze derniers mois, le seuil est obtenu en multipliant par trois la moyenne pondérée des différentes valeurs du SMIC applicables au cours de cette période.
  • La rémunération à prendre en compte afin de vérifier l’éligibilité à l’exonération correspond à l’assiette des cotisations et contributions sociales définie à l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Sont notamment incluses les indemnités de fin de contrat de travail ou de fin de mission.
    • A noter : cette “précision » nous semble incohérente au regard de la loi et des règles d’exonération des indemnités de ruptures.
  • Pour bénéficier de l’exonération, l’accord d’intéressement ou de participation volontaire doit produire ses effets au titre du même exercice que celui du versement de la prime, donc avoir été conclu avant le versement de la prime.
    • A noter : La rédaction nous semble particulièrement maladroite. On comprend néanmoins que pour bénéficier du plafond d’exonération de 6000€ l’accord d’intéressement ou de participation volontaire doit d’une part avoir été conclu avant le versement de la prime et d’autre part être applicable au titre de l’année au cours de laquelle la prime est versée
  • Pour bénéficier de l’exonération, il n’est pas exigé qu’une prime de participation volontaire ou d’intéressement soit effectivement versée.
    • A noter : l’Administration précise même qu’en cas de remise en cause d’un dispositif d’intéressement ou de participation illégal, les exonérations acquises au titre de la PPV ne sont pas remises en cause ! 
  • Les accords ou les avenants d’intéressement conclus à partir de 2022 peuvent prévoir une neutralisation de la prime de partage de la valeur dans le calcul de l’intéressement.
    • A noter : Une fois de plus ce point ne nous semble pas clair concernant cette “neutralisation dans le calcul” de la PPV. Il conviendra d’être vigilent sur la méthode de “neutralisation” fixée dans la DUE ou l’accord d’intéressement.

L’activité partielle en lien avec la guerre en Ukraine

Depuis mars 2022, les entreprises peuvent solliciter le recours à l’activité partielle en se fondant sur leurs difficultés induites, de manière directe ou indirecte, par la guerre en Ukraine.

Concernant les conséquences sur la hausse des prix de l’énergie, le Ministère du travail, dans son questions-réponses, précise que l’entreprise est tenue de démontrer que  :

  • les achats de gaz et/ou d’électricité représentent au moins 3% de son chiffre d’affaires ;
  • à la date de dépôt de la demande, elle a subi une baisse d’excédent brut d’exploitation (EBE) par rapport à 2021.

Lanceurs d’alerte : procédure interne de recueil et de traitement 

Le contenu de la procédure interne de recueil et de traitement des alertes professionnelles qui doit être mise en place dans les entreprises de plus de 50 salariés a enfin été fixé été fixé par le décret d’application n°2022-1284 du 3 octobre 2022.

Le décret fixe notamment les éléments suivants :

  • Le seuil de 50 salariés est apprécié à la clôture de deux exercices consécutifs et selon les modalités de l’article L130-1 du CSS.
  • La procédure interne doit notamment prévoir :
    • Un canal de réception des signalements ;
    • Les personnes ou services désignés par l’entreprise pour recueillir et traiter les signalements ;
    • L’appréciation des conditions de recevabilité et les suites à donner au signalement ;
    • Les garanties concernant l’intégrité et la confidentialité des informations recueillies à l’occasion d’un signalement ;
    • L’information par écrit de la réception du signalement à son auteur dans un délai de 7 jours ;
    • La communication par écrit à l’auteur du signalement, dans un délai raisonnable n’excédant par 3 mois, des informations sur les mesures envisagées ou prises pour évaluer l’exactitude des allégations et, le cas échéant, remédier à l’objet du signalement ainsi que sur les motifs de ces dernières.
  • La procédure doit être diffusée par tout moyen assurant une publicité suffisante. Elle doit être accessible de manière permanente aux personnes susceptibles de l’utiliser.

Jurisprudence 

Repos dominical et forfait jours

La Cour de cassation a considéré dans un arrêt du 21 septembre 2022 que le non-respect par l’employeur du repos dominical d’un salarié soumis à une convention de forfait en jours ne peut pas conduire à considérer que les heures effectuées le dimanche sont des heures supplémentaires.

Attention au licenciement oral 

Dans son arrêt du 28 septembre 2022, la Cour de Cassation rappelle que la date de la rupture d’un contrat de travail correspond à la date à laquelle l’employeur a irrévocablement manifesté sa volonté d’y mettre fin à savoir au jour de l’envoi de la lettre RAR notifiant le licenciement.

Dans cette affaire, l’employeur avait indiqué oralement au salarié la veille de la réception du courrier de licenciement par le salarié qu’il ne devait plus se présenter à son poste. La Cour de Cassation a considéré le licenciement fondé dès lors que la rupture avait été valablement notifiée préalablement.

Attention au dépouillement

Dans son arrêt du 21 septembre 2022, la porte d’accès à la salle de vote était fermée lors du dépouillement, ce qui interdisait aux candidats, à leurs représentants et aux électeurs d’y accéder librement.

Pour la Cour de Cassation, cette seule circonstance, même si une baie vitrée offrait une vue sur la salle de vote, était de nature à compromettre la publicité des opérations de dépouillement, et donc à affecter la sincérité du scrutin. La Cour de Cassation considère dès lors que l’annulation de l’élection pour le collège concerné était justifiée